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Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:40
de Antoine
Poèmes de notre enfance qui prennent sens quand on grandit

L'Homme et la Mer
Charles Baudelaire

Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes ;
O mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets!

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remords,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
O lutteurs éternels, ô frères implacables!



Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Joachim du Bellay

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !

Quand reverrai-je, hélas ! de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m'est une province et beaucoup davantage ?

Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,
Que des palais Romains le front audacieux :
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine,

Plus mon Loire Gaulois que le Tibre Latin,
Plus mon petit Liré que le mont Palatin,
Et plus que l'air marin la douceur Angevine.

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:44
de Dark
Magnifique

Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d’aise
À mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise.

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:47
de Antoine
Et combien cela prend tournure en vieillissant ;)

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:51
de Xaneaze
Le plus beau, mon testament, le dernier que je donne aux CM2 avt qu ils s envolent au collège

Tu seras un homme mon fils

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.




Rudyard Kipling

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:52
de Dark
Antoine a écrit:
Et combien cela prend tournure en vieillissant ;)

A QUI LE DIS TU :cry:

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 22:52
de Dark
[quote="Xaneaze"]Le plus beau, mon testament, le dernier que je donne aux CM2 avt qu ils s envolent au collège

Tu seras un homme mon fils

Celui la tu l aimes ;)

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mar 24 Jan 2012 23:00
de Xaneaze
Je le trouve tellement vrai, une vraie philosophie de la vie, ttes les étapes de la vie y sont, les désillusions, les critiques, les désamours...mais rester soi-même prime au dessus de tt, etre L'HOMME

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Sam 28 Jan 2012 09:20
de Dark
LES COULEURS DE LA VIE de (Wen Yi-To)

Ma vie était une feuille blanche sans valeur.
Le vert m'a donné la croissance,
le rouge l'ardeur,
le jaune m'a appris la loyauté et la droiture,
le bleu la pureté,
le rose m'a offert l'espoir,
le gris léger la tristesse.

Pour terminer cette Aquarelle,
le noir m'imposera la mort.

Depuis,
J’adore la vie parce que j'adore ses couleurs.



WEN YI-TOUO(1899-1946)

Peintre et lettré, il fut le premier grand poète de la littérature chinoise moderne qui ait réussi à donner à la poésie de langue moderne, apparue après le « Mouvement du 4 mai », des formes originales, libérées des règles classiques mais respectueuses de la tradition chinoise et de l'esprit de sa langue. Les circonstances de sa vie conduisirent cet artiste, sensible et patriote convaincu, de l'admiration des classiques, puis de l'esthétisme occidental, à un engagement politique et révolutionnaire dans lequel il finit par trouver la mort. Son œuvre comprend quatre volumes et huit recueils de poésie, de théorie poétique, de critiques et d'essais divers, qui ont exercé – et exercent encore – une très grande influence sur les poètes de son temps comme sur leurs successeurs.

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Sam 28 Jan 2012 09:30
de Antoine
À rapprocher de "Voyelles" d'Arthur Rimbaud

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Sam 28 Jan 2012 10:13
de Dark
Antoine a écrit:
À rapprocher de "Voyelles" d'Arthur Rimbaud

oui envoie ;)

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Sam 28 Jan 2012 11:40
de Antoine
Arthur RIMBAUD   (1854-1891)

Voyelles

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges ;
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux !

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mer 30 Mai 2012 18:30
de Antoine
La Ballade des Pendus

Frères humains qui après nous vivez,
N'ayez les coeurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés cinq, six :
Quant à la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s'en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Si frères vous clamons, pas n'en devez
Avoir dédain, quoique fûmes occis
Par justice. Toutefois vous savez
Que tous hommes n'ont pas bon sens rassis ;
Excusez-nous, puisque sommes transis,
Envers le fils de la Vierge Marie,
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l'infernale foudre.
Nous sommes morts, âme ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

La pluie nous a débués et lavés,
Et le soleil desséchés et noircis ;
Pies, corbeaux, nous ont les yeux cavés,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais nul temps nous ne sommes assis ;
Puis çà, puis là, comme le vent varie,
À son plaisir sans cesser nous charrie,
Plus becquetés d'oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Prince Jésus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu'Enfer n'ait de nous seigneurie :
À lui n'ayons que faire ni que soudre.
Hommes, ici n'a point de moquerie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

François VILLON

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mer 30 Mai 2012 18:33
de Antoine
Après la bataille

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d'un seul housard qu'il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d'une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l'ombre entendre un faible bruit.
C'était un Espagnol de l'armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu'à moitié.
Et qui disait: " A boire! à boire par pitié ! "
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit: "Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. "
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l'homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu'il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant: "Caramba! "
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
" Donne-lui tout de même à boire ", dit mon père.

Victor HUGO

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mer 30 Mai 2012 18:48
de Antoine
L'ALBATROS

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.

Charles BAUDELAIRE

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Mer 30 Mai 2012 20:31
de Dark
Tes fleurs me font mal Antoine

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Jeu 31 Mai 2012 06:23
de Volonté 5.9
Xaneaze a écrit:
Le plus beau, mon testament, le dernier que je donne aux CM2 avt qu ils s envolent au collège

Tu seras un homme mon fils

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.




Rudyard Kipling



Toujours vraiment trés beau.

A mediter Image

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Jeu 6 Sep 2012 21:47
de Antoine
Les Chats

Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l’horreur des ténèbres ;
L’Érèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S’ils pouvaient au servage incliner leur fierté.

Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s’endormir dans un rêve sans fin ;

Leurs reins féconds sont pleins d’étincelles magiques
Et des parcelles d’or, ainsi qu’un sable fin,
Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Jeu 6 Sep 2012 22:00
de Xaneaze
La 1ere poésie de mes élèves de l'année ;)

Le silence est d'or :

"Oui, le silence est d'or",
Me dit toujours maman.
Et pourquoi pas alors,
En fer ou en argent ?

Je ne sais pas en quoi
Je puis bien être faite :
Graine de cacatois,
M'appelle la préfète.

D'accord ! Je suis bavarde.
Mais est-ce une raison
Pour que l'on me brocarde
En classe, à la maison,

Et que l'on me répète
Et me répète encor
A me casser la tête
Que le silence est d'or ?

Est-ce ma faute à moi
Si j'ai là dans la gorge,
Un petit rouge-gorge
Qui gazouille de joie ?

Maurice Carême

Re: Poèmes de Notre Enfance

MessagePosté: Lun 22 Oct 2012 22:01
de Antoine
Ode a la Joie
Friedrich Von Schiller

Mes amis, cessons nos plaintes !
Qu'un cri joyeux élève aux cieux nos chants
de fêtes et nos accords pieux !
Joie !

Joie ! Belle étincelle des dieux
Fille de l'Élysée,
Nous entrons l'âme enivrée
Dans ton temple glorieux.
Tes charmes lient à nouveau
Ce que la mode en vain détruit ;
Tous les hommes deviennent frères
Là où tes douces ailes reposent.

Que celui qui a le bonheur
D'être l'ami d'un ami ;
Que celui qui a conquis une douce femme,
Partage son allégresse !
Oui, et aussi celui qui n'a qu'une âme
À nommer sienne sur la terre !
Et que celui qui n'a jamais connu cela s'éloigne
En pleurant de notre cercle !

Tous les êtres boivent la joie
Aux seins de la nature,
Tous les bons, tous les méchants,
Suivent ses traces de rose.
Elle nous donne les baisers et la vigne,
L'ami, fidèle dans la mort,
La volupté est donnée au ver,
Et le chérubin est devant Dieu.

Heureux, alors que Ses soleils volent
Sur le glorieux système céleste,
Courez, frères, sur votre voie,
Joyeux, comme un héros vers la victoire.

Qu'ils s'enlacent, tous les êtres !
Ce baiser au monde entier !
Frères, au plus haut des cieux
Doit habiter un père aimé.
Tous les êtres se prosternent ?
Pressens-tu le créateur, Monde ?
Cherche-le au-dessus des cieux d'étoiles !
Au-dessus des étoiles il doit habiter.

Joie ! Belle étincelle des dieux
Fille de l'Élysée,
Soyez unis êtres par millions !
Qu'un seul baiser enlace l'univers !